jeudi 16 janvier 2014

Réflexions

Mon blog est en pause, mais pas moi ! En ce moment, je suis en pleine réflexion, c'est un moment de latence dans l'expression.

Je participe au forum de Linecoaching, qui m'apporte énormément. J'y trouve des réponses à des questions que je me pose, des réponses à des questions que je ne me pose pas, des pistes de réflexion.

Je lis, très lentement, "Maigrir, c'est dans la tête", de Gérard Apfelforfer. J'ai commencé par le début, et puis j'ai sauté des pages pour aller dans le chapitre sur l'hyperempathie. Je le lis très lentement (j'ai dû le commencer il y a quasiment trois semaines, et je suis loin du bout), parce que c'est une découverte assez hallucinante, et pas forcément très agréable (même carrément parfois désagréable). J'ai besoin de digérer ce que j'y découvre et qui me correspond trait pour trait sur la quasi totalité des points.

En attendant, je continue à manger quand j'ai faim, à essayer d'arrêter quand je n'ai pas faim, à faire un sas de décompression de fin de journée dans lequel je pratique la RPC, je prends davantage soin de mon corps (nettoyage de visage le soir, massage de pieds) et ça s'est fait de manière instinctive, ça n'est pas une décision soudaine, c'est comme un besoin, comme la faim : un besoin du corps que je satisfais. Quand je me sens agitée, je me "scanne" rapidement, pour voir ce qui cloche. Parfois c'est parce que j'ai froid, ou chaud, ou que j'ai un stress quelconque, j'essaie de savoir d'où ça vient, si je peux faire quelque chose pour y remédier, ou s'il n'y a rien à faire. S'il n'y a rien à faire, j'essaie de m'ouvrir à la sensation, de l'accepter (dans le forum, une intervenante dit un truc du genre qu'elle essaie de s'ouvrir comme l'océan : il n'essaie pas de lutter contre ses vagues, ça serait absurde).

Mon EME du soir est nettement moins forte en ce moment. Elle est toujours présente, j'y cède toujours, mais je mange généralement moins. Je perçois plus nettement l'absence de faim, et l'envie de ne pas me sentir remplie. Du coup, même si je me remplis quand même, je me remplis moins. C'est comme si j'étais déjà trop pleine avant de céder à mon EME.

Du coup, j'ai faim plus tôt le matin, parfois même lors du petit-déjeuner, ce qui ne m'était pas arrivé depuis longtemps (je ne sais même pas si ça m'arrivait avant, puisque je ne me demandais pas si j'avais faim ou pas avant de manger). J'ai remis le sucre dans mon café, et ça suffit à tenir jusqu'à midi (sauf parfois, où je mange un tout petit truc, à la récréation, en faisant attention à ne pas compromettre ma faim de midi - c'est trop désagréable de manger sans faim à midi, et ce n'est pas confortable de ne pas manger, parce que ça tiraille trop tôt dans l'après-midi, ça tiraille du besoin de manger un repas, et je n'ai le temps de manger qu'une collation). Du coup, ça fait un certain temps que j'ai toujours faim à midi. J'ai aussi très souvent faim en fin d'après-midi, mais pas pour un trop grand goûter (je tiens à préserver ma faim du soir). Et le soir, j'ai souvent faim plus tôt (7 h au lieu de 8 ou 9).

Les changements sont assez importants, mais c'est en écrivant tout ça que je m'en rends compte. Vraiment importants : comme tous ceux qui commencent Linecoaching, j'étais en décalage. Ma faim ne correspondait pas aux moments des repas. Les anciennes du forum ont beau dire que ça va se caler, on sent bien que non, pas du tout. Pour elles ça a marché, mais pas pour moi. Et pourtant si, pour moi aussi ça fonctionne, et de plus en plus instinctivement.

Le seul moment de réflexion, c'est sur la taille de la collation de fin d'après-midi. J'essaie de la prendre toute petite, et de voir si j'ai encore faim. Mais ça n'est pas par restriction, c'est pour préserver la faim du soir. Souvent aussi je fractionne consciemment mon repas du soir, pour expérimenter "la petite place", et la sensation, une demi-heure plus tard, qu'elle est comblée. Ce qui, parfois, me permet de manger le soir en ayant faim (un peu faim) au lieu de manger sans aucune faim.

Parfois aussi, je me sens agitée, et j'essaie de me "scanner" pour voir d'où ça vient. Quand j'en prends conscience, j'arrête de manger, parce que l'agitation gâche le plaisir de la nourriture. Ensuite, j'essaie de me concentrer sur la dégustation, pour me protéger de la frustration. Quand je mange alors que je suis agitée, à la fin, j'ai une EME. Quand je laisse les dernières bouchées m'apporter tout le plaisir qu'elles peuvent m'apporter, je n'ai pas d'EME, juste de la plénitude. Ca marche à fond à midi, quand je mange mes petits sandwiches en corrigeant les cahiers. Je suis plus attentive à ce qu'il se passe dans ma bouche qu'avant (en fait, j'y suis attentive tout court, parce qu'avant, je ne l'étais quasiment pas du tout, je veillais juste à éteindre toute faim éventuelle à grands coups de salade composée jusqu'à sentir mon ventre rempli). Mais je suis moins attentive que quand je mange sans cahiers à corriger, forcément. En ce moment, j'emporte une barre de chocolat dans mon pique-nique à l'école (du Nestlé à cuisiner, je n'ai rien d'autre en ce moment). A la fin de mon repas, j'arrête mes corrections, et j'en déguste deux carrés. Et là, c'est le bonheur. La fête de la bouche ! Je me suis rendue compte que je souriais. Je ne me sens plus frustrée du tout, je range le reste de la barre et je ne suis pas tentée du tout de le finir (ça sera moins bon, je le sais, je l'ai maintes fois testé depuis que j'ai commencé Linecoaching. Deux carrés, c'est le maximum que je peux manger à plaisir égal. Le troisième a très nettement moins de goût, il est même carrément décevant, et bon, finir sur une touche de déception, bof), ni de toucher à ce que j'ai emporté "au cas où" (en ce moment, c'est du pain essène, que j'ai découvert récemment et que j'aime vraiment beaucoup). Et je me remets à corriger, et je sens mon esprit plus apaisé.

En fait, toute ma réflexion m'amène assez loin de la préoccupation de perdre du poids. Je l'ai toujours, bien sûr. Mais le confort s'installe sur tellement de points de ma vie, nourriture, respect du corps, découverte de ma capacité à avoir des émotions autonomes, découverte des difficultés liées à mon hyperempathie (des atouts liés à mon hyperempathie, aussi), et cette découverte de l'hygiène du mental (le moment de RPC du soir, les fréquents retours sur moi-même, mes conforts, inconforts, sensations, émotions) que tout ça, ça rend le poids et la perte nettement moins capitaux.


Selon mes vêtements, je n'ai pas pris de poids, ça ne serre toujours plus, et je ressens toujours cette impression de "flotter" (même si le mot est un vraiment trop fort) au niveau des cuisses, qui est apparue il y a environ un mois. Selon la balance de mon médecin, je le saurai d'ici une ou deux semaines. Pour le moment, ça ne me stresse pas. Les deux fois précédentes, c'était vraiment important pour moi de savoir, et d'avoir perdu du poids. Et un peu avant le rendez-vous, c'était un stress. Je suppose que ça sera pareil cette fois, mais j'essaie de ne pas en faire une affaire. La vraie affaire, c'est que mes vêtements me vont alors que je me suis régalée pendant les fêtes, que je ne me suis privée de rien, et que je ne me suis pas mise en restriction après. Après le premier de l'an, j'ai eu l'impression d'être plus gonflée qu'avant, et puis j'ai eu mes règles, et à nouveau cette impression d'être à l'aise dans mon jean et qu'il ne colle pas à mes cuisses.

Tout ce que je vis grâce à cette démarche est intensément passionnant pour moi. Ca n'est pas toujours facile (je referme parfois rageusement le frigo, parce que j'ai réussi à décider de ne pas céder à une EME de fin de repas, et que ça me fait râler), mais c'est toujours un surcroît de plaisir (après avoir refermé le frigo, je respire, je m'ouvre à la frustration, je l'accepte, et je me fais rire de mon geste de gamine en colère (à deux ou trois ans, j'avais fait une crise de caprice, à me rouler par terre dans la cuisine, pour que ma mère me donne un autre carré de chocolat. Et comme elle faisait comme si elle ne me voyait pas, je tapais dans la porte du frigo avec mon pied - et là, paf, un petit coup dissuasif sur les fesses... ah mais finalement, elle me voit ! et bon, après, j'étais allée jouer : finalement, le boss à la maison, c'était pas moi !). Et le plus énorme plaisir, c'est au bout de quelques minutes (parfois cinq parfois davantage), quand je m'aperçois que je n'ai plus l'EME, que j'ai réussi à "laisser cette petite place", et que le manque c'est transformé en plaisir de ne pas être trop remplie, juste pile ce qu'il faut pour que mon corps soit bien.

Pour le moment, ça n'est pas une habitude, c'est assez rare que je tombe pile sur la "petite place" de la bonne taille, celle qui ne continuera pas à me tirailler au bout d'une demi-heure (signe qu'en fait, mon EME de fin de repas était de la vraie faim), ou qui ne se transformera pas en sensation d'être un chouïa plus remplie que ce que j'apprécie. Parfois aussi je décide de ne pas laisser cette "petite place", parce que je ne souhaite pas vivre l'EME de fin de repas, parce que je ne me sens pas assez bien pour la supporter. Dans ce cas, j'essaie de déguster les dernières bouchées (tant qu'à ne pas laisser la place, autant déguster ce qui va la remplir, mais parfois, je n'arrive pas à déguster, comme si je ne m'y autorisais pas, et que du coup il faut que je fasse vite, avant que je m'en empêche). Ensuite, je me sens un peu trop remplie, plus qu'un chouïa. En période de règles, avant ou pendant, c'est un confort. Mais à part dans ces moments, c'est un inconfort. J'essaie de bien le percevoir, de bien en prendre conscience. C'est comme si mon cerveau reptilien, celui dont je me méfiais, et qui en fait est celui qui a besoin d'être rassuré, apprenait des sensations du corps. Comme si tout ce qui était vécu répétitivement comme inconfortable, il apprenait à l'éviter (comme le troisième carré de chocolat à midi).

Pendant mes régimes, j'essayais de terrasser mon "cerveau reptilien". J'ai relu des passages de mon ancien blog, notamment une sur mon interprétation du cerveau reptilien, et je ne ressens plus du tout la même chose. Avec cette démarche, j'ai l'impression que je suis le Petit Prince, et que le cerveau reptilien, c'est le renard. Et en fait, le cerveau reptilien, c'est une partie de moi, ça n'est pas quelque chose que je peux terrasser, et ça n'est même plus quelque chose que je voudrais terrasser. C'est une partie de moi que je veux connaître. Je la rassure, j'essaie de l'apprivoiser, et elle m'apprivoise aussi en me rassurant. Quand je mange du chocolat, elle ne me donne pas envie d'en manger davantage. Elle est comme moi, puisqu'elle est aussi moi : elle observe l'effet que ça a sur le corps, le plaisir dans la bouche, la tranquillité dans la tête, et elle est comme moi, puisqu'elle est aussi moi : éblouie ! Ca n'est pas cette partie de moi qui déclenche mes EME. C'est un inconfort, que je dois identifier pour le faire disparaître, ou l'accepter. Ce que j'appelais "moi", c'est la partie qui essaie de décider plus ou moins rationnellement. Ce que j'appelais "le cerveau reptilien", c'est la partie de moi qui me tire sur le bras pour m'empêcher de décider, comme un enfant apeuré (peut-être mes émotions ?). En se rassurant l'une l'autre, ces deux parties se réunissent (c'est cool, ça m'évite le dédoublement de personnalité et la camisole de force !)

J'ai toujours l'impression d'être au début du chemin. Je crois quand même que j'ai avancé, sur le plan du comportement alimentaire (même si rien n'est acquis). Mais j'ai découvert que le chemin du comportement alimentaire était posé sur le chemin émotionnel. Si je ne parcours pas ce chemin émotionnel, le comportement alimentaire sera un jour ou l'autre déstabilisé (sachant qu'il pourra être restabilisé, quand je me reconnecterai à mes sensations : rien n'est acquis, mais rien ne sera définitivement perdu). Pour le moment, ce chemin émotionnel m'intéresse, et surtout, je peux le parcourir à mon rythme. Pour le moment, je peux le parcourir seule. Si j'ai besoin de l'aide d'un psy, j'espère en trouver un qui aura la formation de l'association GROS, ou au moins la collection complète des livres de Gérard Apfeldorfer dans sa bibliothèque. Mais sur la carte des médecins affiliés au GROS, ma région est vide.

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Le renard se tut et regarda longtemps le petit prince:
- S'il te plaît... apprivoise-moi ! dit-il.
- Je veux bien, répondit le petit prince, mais je n'ai pas beaucoup de temps. J'ai des amis à découvrir et beaucoup de choses à connaître.
- On ne connaît que les choses que l'on apprivoise, dit le renard. Les hommes n'ont plus le temps de rien connaître. Ils achètent des choses toutes faites chez les marchands. Mais comme il n'existe point de marchands d'amis, les hommes n'ont plus d'amis. Si tu veux un ami, apprivoise-moi !
- Que faut-il faire? dit le petit prince.
- Il faut être très patient, répondit le renard. Tu t'assoiras d'abord un peu loin de moi, comme ça, dans l'herbe. Je te regarderai du coin de l'œil et tu ne diras rien. Le langage est source de malentendus. Mais, chaque jour, tu pourras t'asseoir un peu plus près...


( http://microtop.ca/lepetitprince/chapitre21.html )