jeudi 20 mars 2014

Tentation et repas convivaux

Ecrit sur le fil "La tentation" du forum de Linecoaching, consacré aux tentations des repas conviviaux, notamment familiaux, notamment chez les parents.

19/02

En réponse à une forumeuse qui parlait d'un déclic dans la tête qui n'arrivait pas.

Pour moi, ça n'est pas un déclic dans la tête, c'est un apprentissage, notamment corporel. Je ne sais pas si ça fera un jour un déclic dans ma tête, mais ce que ça me fait pour le moment, c'est une familiarisation avec des sensations, qui font que je préfère ne pas faire un week-end trop copieux, à cause des sensations corporelles positives que j'ai quand j'ai respecté ma faim et mes envies.
En réponse à une autre forumeuse, qui parlait de la tarte de sa grand-mère et de sa difficulté à se dire qu'elle pouvait arrêter d'en manger quand elle n'avait pas faim, que ça n'était que de la nourriture.

Ca n'est pas que de la nourriture. Il y a toujours davantage, derrière les aliments (j'ai adoré lire les passages sur ça, dans "Mangez en paix" du Dr Apfeldorfer, ça m'a beaucoup appris). Une tarte de ta grand-mère, c'est de l'amour, c'est son expérience, son plaisir à nourrir son entourage, sa patience à pâtisser, le temps qu'elle a passé à faire et à refaire jusqu'à obtenir ce résultat, son obstination ! En mangeant cette tarte, tu manges tout ça. Donc non, ce n'est pas que de la nourriture. C'est bien pour ça que ça n'est pas facile !

Les conseils que les autres t'ont donnés sont excellents (avoir la recette, en emporter pour plus tard). Discuter de la recette, exprimer le désir d'en profiter une fois chez toi, ça permet aussi à l'amour de circuler. Avoir la recette des truffes au chocolat noir de mon frère m'a aidée à ne pas trop me lâcher dessus à Noël, et c'est aussi une forme de remerciement envers lui, qui avait pris la peine de les faire. En emporter pour plus tard, ça m'aide, quand je suis chez mes parents, à ne pas prendre de la brioche maison au petit-déjeuner alors que je n'ai pas faim au petit-déjeuner, et c'est aussi une forme d'échange d'amour : ça fait plaisir à ma mère de me nourrir, même en différé, et ça me fait plaisir de manger ce qu'elle confectionne.

Mais je dépasse toujours ma satiété, chez mes parents. On est en famille, c'est festif, on est content. Je la dépasse cependant de moins en moins. L'avant-dernière fois, il m'a fallu une bonne demi-journée pour avoir de nouveau faim, au lieu d'une journée. Là, en un quart de journée, elle est revenue.

Pour y arriver, je fais un tour côté cuisine pour savoir ce qu'il y a au menu. Et je fractionne en conséquence. Si j'ai une grosse envie de brandade de morue, je prends peu du reste. Si c'est le dessert qui me tente, je prends peu des autres plats et une part normale du dessert. Je fais aussi impasse sur ce qui me tente peu, ça me laisse de l'appétit pour ce qui me tente vraiment. Je laisse aussi de côté ce que je mange couramment chez moi, sauf si j'en ai très envie (par exemple une mandarine : je m'en suis régalée ce week-end chez mes parents, parce que j'en avais très envie, mais en principe, je les évite, je préfère les gâteaux de ma mère, que je n'ai pas chez moi).

Mais les repas de famille, chez nous, ça tient un peu du buffet. Il y a plein de choses sur la table, et chacun se sert comme il veut. C'est parfois rageant de voir que "comme je veux", c'est à peine un quart de ce qui est dans l'assiette de mes frères ou de mes belles-soeurs (même mon neveu de 4 ans a un plus gros appétit que le mien - quoiqu'il ne finit pas toujours ses assiettes, donc peut-être pas). Mais ça fait du bien de ne pas me sentir lourde après le repas, d'avoir faim au repas suivant, de ne pas sentir que je dois manger absolument d'un aliment, parce que c'est maintenant ou jamais, de ne pas me demander comment je vais rattraper "ça", comme quand j'étais au régime.

"Ça", c'est du bonheur familial, ça ne se rattrape pas, ça se déguste, mais ça se déguste en entier : l'aliment, oui, et puis son histoire, la conversation, les gens, le mouvement, tout  - mais pas forcément en même temps. Quand je suis chez mes parents, je suis plus attentive à ne pas mettre un aliment dans ma bouche si je participe à une conversation, même simplement avec les oreilles. Finis les avalages rapides de bouchées pour pouvoir donner mon avis dans une conversation. Soit je ne donne pas mon avis dans la seconde (et bon, je dois reconnaître que le monde n'y perd pas tant que ça, même si j'adore mettre mon grain de sel partout), soit je diffère ma bouchée.

En tous cas, c'est drôlement intéressant de "travailler" sur les repas conviviaux, notamment familiaux. Il y a de la matière, et on y voit l'évolution de notre comportement, ou bien on y met le doigt sur ce qui coince.

3 commentaires:

Cicciotella a dit…

J'ai beaucoup de mal avec les recettes familiales ; effectivement, j'y rattache plus que de la nourriture.
Je redis que je trouve l'idée de demander les recettes en amont excellente pour ne pas se ruer sur le plat en aval !

Anonyme a dit…

Je suis contente que vous ayez repris vos publications, je trouve peu de blogs qui sont "Zermati Friendly" ! Vos messages sont très instructifs pour moi qui essaie de me reconnecter plus étroitement avec mes sensations. Ce billet sur la nourriture qui n'est pas juste de la nourriture est tout à fait pertinent. Je dépasse toujours (beaucoup) ma satiété lors des repas familiaux parce qu'effectivement je culpabilise de ne pas goûter à tous les plats... (Bizarrement chez des amis ça me dérange moins!)

Pattie a dit…

Merci pour votre message !
Tout ce que j'ai écrit, je l'ai expérimenté à partir du livre du Dr Apfeldorfer, qui est un vrai régal à lire !
Bon chemin de reconnexion à vous !